Alors Dieu, le Majestueux – que sa Majesté soit exaltée – fait cet appel : « O Mohammad ! Relève la tête. Parle et tu seras entendu ; intercède et tu seras exaucé ! » Mohammad – que Dieu lui accorde Grâce et Paix – dit : « O Seigneur ! Décide entre Tes serviteurs ! Car leur position d’attente n’a que trop duré, d’autant plus que chacun d’eux a reconnu ses péchés sur la scène de la Résurrection ». L’appel retentit de nouveau : « Certes, ô Mohammad ». Puis Dieu ordonne qu’on prépare le Paradis en le revêtant de sa parure. Pendant qu’on l’amène, il dégage une brise agréable, la plus douce et la plus enivrante qu’on puisse sentir. On peut sentir son odeur à une distance de cinq cent années de marche, ce qui rafraîchit les cœurs et ranime les âmes, sauf pour ceux dont les œuvres terrestres étaient perverses, car ils seront privés de sa brise. Une fois que l’on place le Paradis à la droite du Trône, Dieu – qu’Il soit exalté – ordonne qu’on amène l’Enfer. Mais celui-ci se remplit aussitôt de terreur et de frayeur et dit aux Anges envoyés vers lui : « Savez-vous si Dieu a créé des créatures au moyen desquelles il va me châtier ». Les Anges le rassurent et lui répondent : « Non, par la puissance de Dieu ! Nous sommes envoyés vers toi seulement pour que tu te venges de ceux qui ont désobéi à ton Seigneur. Car c’est pour un Jour comme celui-ci que tu as été créé ». Les Anges amènent alors l’Enfer marchant sur quatre pieds dont chacun comporte soixante-dix mille chaînes ; chacune de ces chaînes à soixante-dix mille anneaux dont le poids de chacun d’eux pèse plus lourd que tout le fer de la terre entière. A chaque anneau sont préposés soixante-dix mille gardes. Si on ordonnait à l’un de ces gardes de démolir une montagne il le ferait, et si on lui ordonnait de détruire la terre il l’anéantirait. L’Enfer avance en grondant, en mugissant et en lançant des étincelles et une fumée bouillante qui enveloppe tout l’horizon dans l’obscurité. Quant il n’est plus qu’à environ mille années de marche des créatures, il s’échappe des mains de ses gardes et se lance vers la foule rassemblée qui attend le Jugement, en produisant un grondement sourd et aigu. Alors les gens s’écrient : « Qu’est-ce ? » et on leur répond : « C’est la Géhenne qui s’est échappée des mains de ses gardiens, lesquelles n’arrivent plus à la tenir en raison de sa puissance ». Tout le monde se met à genoux, y compris les envoyés de Dieu. Ainsi, Ibrahim, Moïse et Jésus se cramponnent au Trône, oubliant le premier Isma’il, le second Aaron et le troisième Marie. Et chacun d’eux s’écrie : « O Seigneur ! Prends soin de ma seule âme ! Je ne Te demande rien d’autre aujourd’hui ». En revanche Mohammad – que Dieu lui accorde Grâce et Paix – s’écrie : « Ma communauté ! Ma communauté ! Sauve-la et délivre-la, ô Seigneur ! ».
C’est l’instant où, sur la place du Rassemblement, il n’y a pas un seul homme que ses genoux puissent porter, conformément à la Parole de Dieu – qu’Il soit exalté : « Tu verras toutes les communautés accroupies, chaque communauté sera appelée vers son livre. Or, en s’échappant, l’Enfer trébuche sous le coup de la colère et de la rage », comme l’indique la Parole de Dieu – qu’Il soit exalté : « Quand l’Enfer les percevra de loin, ils entendent son grondement et le crépitement de ses flammes », c’est-à-dire qu’il manifeste grandement sa colère et sa rage. En effet, Dieu – qu’Il soit exalté – dit encore : « Peu s’en faut que l’Enfer n’éclate en deux morceaux sous la violence et la colère ».
L’Envoyé de dieu – que Dieu lui accorde Grâce et Paix – surgit alors et saisit l’Enfer par la bride. Il le fait dérouter et lui dit : « Recule jusqu’à ce que les contingents qui te soient destinés viennent à toi ! » L’Enfer répond : « Laisse-moi passer, ô Mohammad ! Car il m’est interdit de te toucher ». Alors une voix l’interpelle de derrière les voiles de la Majesté : « Ecoute Mohammad et obéis-lui ». Ensuite on entraîne l’Enfer et on l’installe à la gauche du Trône. Ceux qui attendent le Jugement se mettent à parler de cet entraînement de l’Enfer et leur frayeur diminue. C’est là le sens de la Parole de Dieu- qu’Il soit exalté : « Nous ne t’avons envoyé que par miséricorde pour l’humanité ». C’est à ce moment qu’on installe la Balance (al-Mizan) composée de deux plateaux : un de lumière placé à la droite du Trône, et un de ténèbres placé à sa gauche. Ensuite Dieu, la Majestueux, découvre Sa jambe, et tous les hommes se prosternent devant Lui par humilité pour reconnaître toute Sa grandeur, à l’exception des mécréants qui ne peuvent se prosterner car leur colonne vertébrale est faite de métal ferreux. C’est le sens de la Parole de Dieu – qu’Il soit exalté : « Au jour où le bas d’une jambe sera mise à découvert et où ils seront appelés à se prosterner mais ils n’en seront pas capables ». A ce sujet, al-Boukhari rapporte dans son commentaire le Hadith suivant, muni de sa chaîne de transmission, dans lequel l’Envoyé de Dieu – que Dieu lui accorde Grâce et Paix – a dit : « Au jour de la Résurrection, Dieu découvrira le bas de Sa jambe, et tous les croyants des deux sexes se prosterneront devant Lui ». Or, je me garde, par scrupule et par crainte, d’interpréter ce Hadith tout en désavouant ses négateurs. De même, je me garde de faire la description de la Balance et je récuse les paroles de ceux qui la décrivent allégoriquement, car j’estime que la Balance procède du monde du Malakout. En effet, les bonnes et les mauvaises œuvres sont des accidents. Or, les accidents ne peuvent être vraiment pesés que dans la Balance du Malakout.
Pendant que les gens sont prosternés, Dieu, le Majestueux, appelle d’une voix qu’on entend de loin comme de près : « Je suis le Roi, le Juge souverain. Aucune injustice d’un homme injuste ne peut m’échapper, en effet, si elle m’échappait, ce serait Moi l’Injuste » (Rapporté par al-Boukhari). Il tranche alors les différents entre les animaux, rend justice en faveur de la bête sans corne contre celle qui est cornue et juge les litiges entre les animaux sauvages et les oiseaux. Puis Il leur dit : « Devenez poussière ! » Et l’on aplanit la terre au-dessus d’eux. C’est le moment où « Le mécréant fait le vœu et dit : Je voudrais bien me transformer en poussière ».